Plus jeune terre du monde, l’Islande est un hymne à la nature, un trésor encore vierge et énigmatique. Fouler ses limons telluriques, ces tapis gonflés par l’eau, nous plonge dans la peau des explorateurs, dans un monde de feu et de glace.

Le professeur de Jules Verne ne commence- t-il pas son voyage au centre de la terre sur cette île presque surnaturelle, qui reste la moins peuplée d’Europe malgré sa taille conséquente ? Nous avions une envie intense de la découvrir et avons sauté sur on offre Icelandair pour y partir lors d’un week-end prolongé. Décoiffant !

Départ avec Icelandair

Mercredi 14 avril – 14.15 – Arrivée Reykjavik 15.45

Retour

Dimanche 18 Avril 7.45 – Arrivée Paris 13.05

Aucun doute : l’Islande est une rencontre brutale avec la terre des origines, une terre vivante, inachevée, qui mijote encore et dont la lumière venue du sol nous laisse percevoir toute sa poésie. Nous avons exploré sa côte sud, une région de basses terres caressées par les méandres fluviaux,  des côtes sablonneuses, des torrents glaciaires, des villes et villages pittoresques.

Notre parcours dans le Sud de l’Islande

Reykjanes Lagon Bleu – Reykjavik – Eryaki – Hveragerdi – Selfoss – Les Geysers – Cratère de Kerio – Chute de Gullfoss – Parc National de Thingvellir

Bain relaxant à la silice, les délices du Blue Lagoon

Il y a pire pour commencer le week-end que de glisser dans les eaux avoisinant les 35° n’est-ce pas ? Les résurgences sulfureuses d’une usine géothermique font place à un lac bleu turquoise ; l’eau y est délicieusement laiteuse ; les boues argileuses et blanches, qui composent le fond du lac, sont douces aux pieds comme à la peau; tout autour le paysage confronte ses noirs de jais au bleu « lagon » et aux panaches blanc pur de la vapeur jaillissante.

Reykjavik, la Baie des fumées

Nous sommes non loin de la capitale la plus septentrionale du monde, qui à l’époque de notre escapade, comptait 113000 habitants. En centre ville, entouré de belles demeures du début du siècle, s’étend le petit lac Tjörnin, rempli d’oies, de canards et de goélands qui attirent les enfants. L’église Hallgrimskirka le surplombe : elle doit son nom à un poète du 17ème siècle Hallgrimmur Pétursson (auteur des « Psaumes de la Passion ») et abrite de grandes orgues. A l’entrée siège une statue de Leifur Eiriksson (découvreur du Canada en l’an 1000). Les lieux sont paisibles mais le vent omniprésent réveille l’épiderme de nos visages !

Les réserves d’eaux chaudes de la ville sont concentrées dans la Perle, qui donne une belle vue sur la capitale. Les îles Vestmann sont les « îles des gens de l’ouest », situées à 35km de Reykjavik. Les esclaves irlandais s’y réfugièrent lorsqu’ils furent chassés du pays. En 1973, l’île s’agrandit suite à l’éruption volcanique qui détruisit plus des trois quart du village. L’île compte aujourd’hui 5000 habitants et est redevenu un port de pêche florissant. L’île accueille de nombreuses colonies d’oiseaux.

Direction Eryaki er Hveragerdi

Rares sont les ports de pêche sur la côte sud, du fait des longues plages de sables qui s’étendent à perte de vue. Mais Eryarki est l’un deux. A Eryarki, toutes les maisons ont un nom et les habitants n’utilisent pas les noms des rues pour se repérer.

Hveragerdi est une ville thermale, par ailleurs réputée pour son collège d’horticulture. Nous visitons les serres où règne incontestablement un parfum d’exotisme sous les grandes toitures vitrées. Jusqu’en 1970, les bananes y étaient cultivées pour le marché local. (Mais la compétitivité des pays d’Amérique centrale a changé la donne).

L’Islande a une économie basée essentiellement sur l’agriculture et la pêche, bien que l’accroissement démographique de la capitale reflète les changements de la société. Les fruits, légumes et céréales sont importés. L’Islande est auto suffisante avec la production de lait et de viande. Les importations de viande ne sont plus autorisées depuis que les troupeaux de moutons islandais ont été contaminés par des maladies venues de l’extérieur. Moutons, chevaux, bovins sont les principaux animaux domestiques. Chaque année, les fermiers font la transhumance.

Les Geysers

Geysir en islandais signifie « le déclamateur » : c’est lui qui a donné leur nom à tous les geysers du monde. Le véritable Geysir est cependant essoufflé aujourd’hui, un autre geyser, Strokkur, a pris le relais. Le spectacle est impressionnant et très prenant : les explosions sont irrégulières, toutes les 3 à 5 minutes environ. L’eau se met à « gonfler » brièvement en une bulle d’un beau bleu qui éclate vite en panache de vapeur.

La chute d’or

Située à seulement quelques kilomètres de Geysir rugit Gullfoss, la chute d’or. Son nom vient de l’arc-en-ciel qui se forme au-dessus d’elle chaque fois que le soleil daigne l’éclairer. Le site est protégé depuis le début du siècle. A cette époque, des industriels voulaient profiter de la puissance des chutes pour installer une usine hydroélectrique. La fille du propriétaire des lieux le menaça de se jeter dans la chute s’il cédait. Le site est protégé et une stèle a été érigée en l’honneur de cette femme.

« C’était aux temps reculés où les aigles chantaient

Quand d’énormes masses d’eau tombaient des hauteurs célestes »

(Chant de Helgi )

Le bruit du vent et de la cascade mêlée nous coupent la parole. Impressionnante est la force des eaux, qui se glacent, jaillissant à l’air libre, et nous rappelle à notre nature modeste. C’est grisant !

Le Cratère Kerio

L’île dispose d’une activité volcanique intense, principalement sous marine, avec une chaîne qui s’étend du sud au nord ouest, sur le rift atlantique. Les éruptions sont fréquentes. La lave remplit le vide qui se forme entre les plaques eurasienne et nord américaine. L’Islande est le point le plus chaud de cette chaîne. Une vingtaine d’éruptions, dont quelques unes sous les glaciers, parsème l’histoire du pays depuis 1960. Le mouvement de séparation des plaques terrestres accentue la vivacité des sols ; la mince croûte terrestre laisse ressurgir le magma à la surface de la terre. Cette activité géothermique incessante explique l’abondance des sources d’eau chaudes. Cette énergie naturelle (dont seulement 10% a été exploité) est une menace mais aussi un don de la nature à préserver.

Nous sommes allés faire un tour du côté du plus jeune des volcans islandais Kerio. Les géologues, non satisfaits de la thèse du cratère explosif (du fait du manque de débris) ont finalement découvert les explications de la formation de ce cratère de 3000 ans. Ce cratère est en fait le résultat de l’effondrement du cône de scories sur lui-même. Quant au magnifique lac qui le constitue, il n’est autre que la nappe phréatique mise à nu, le jeu de séduction de la Nature avec les Hommes.

Plongée entre deux continents

A quelques dizaines de km de Reykjavik, le monde se sépare en deux : la plaque américaine d’un côté, la plaque eurasienne de l’autre. Thingvellir est l’un des rares endroits où l’on peut apercevoir le rift atlantique. Les fissures provoquées par la tectonique des plaques américaines et européennes sont parallèles. Au milieu, la faille de Silfra qui grandit un peu plus chaque année. Je ne me suis pas munie de matériel de plongée et tuba pour observer ce magnifique phénomène en me rendant au parc de Thingvellir pour pouvoir l’observer dans la profondeur des eaux cristallines au bleu-vert irréel dit-on, mais nous avons suivi les magnifiques murs de basalte matérialisant les lignes de partage. Une partie de la chaîne volcanique n’a pas été remplie de lave et un lac de 84km², d’une profondeur de 114 m², s’est formé. Le lac qui s’étend au milieu de la lande donne au lieu un caractère mythique.

Le Parc National de Thingvellir, est le symbole de la conscience islandaise. « Les plaines du parlement » était le chef lieu de l’Assemblée Nationale islandaise. Chaque année, les élus se rassemblaient pour cette rencontre festive. Les habitants contractaient mariages, alliances, accords commerciaux. Après le grand tremblement de terre qui eu lieu au 18ème siècle, l’Assemblée fut transférée à Reykjavik et le lieu devient un parc national en 1928.

Chevaux aux vents et paysages nus

En parcourant les routes du Sud, nous avons bien entendu pu croiser le célèbre poneys islandais, race demeurée pure depuis son apparition. Ces poneys à l’allure caractéristique (le tölt) vivent l’année à l’extérieur, en troupeaux à demi sauvages, se nourrissant de lichens et d’algues marines, parfois des harengs que leur donnent leurs éleveurs. Dans les récits des sagas islandaises, le cheval occupe une place de choix. Il est qualifié de « þarfasti þjónninn »: le serviteur le plus utile. C’est qu’il a été, depuis l’époque viking, l’auxiliaire indispensable à toute installation humaine et l’unique moyen de transport.

Les chevaux sont parsemés sur un territoire quasi dépourvu de végétation. La bruyère, les paysages herbés et la mousse ne laissent qu’un espace très restreint aux petites forêts de bouleaux.

En 874, lorsque le premier viking trouva un pays boisé. 20% du pays lui appartenait. Il distribua quelques parcelles à sa famille venue de Norvège. Aujourd’hui, la forêt ne représente plus que 1% du territoire. Ce changement s’explique par plusieurs facteurs :

  • L’arrivée des hommes : les vikings utilisaient les arbres comme combustible, pour la construction et la réparation des drakkars, et pour leurs habitations
  • L’importation de nouveaux animaux tels les moutons qui mangeaient les petits arbustes
  • La détérioration du climat ; les hivers s’allongent et se font de plus en plus rudes

Au début du 20ème siècle, les Islandais tentent de reboiser leur île, en recherchant des espèces appropriées jusqu’en Sibérie ou en Alaska. Mais l’Islande est un pays au climat très instable. En hiver, la température peut varier de 10 à -10 dans la même journée, les vents du Gulf Stream ravagent les plaines côtières ; la saison estivale peut s’accompagner de véritables déluges.

Pour en savoir plus …

Un peu d’histoire et de culture

Quand l’Islande fut elle vraiment découverte ?

Des manuscrits irlandais datant du 7ème siècle parlent de cette île sauvage.  Des moines irlandais y vivaient en ermites mais l’arrivée des colons païens les chassa de cette terre isolée. Le premier viking qui établit sa ferme la surnomma Reykjavik, « la baie de la fumée ».

Les hommes venaient principalement du Royaume de Norvège : certains chefs avaient perdu leur autonomie à l’unification du royaume et décidèrent d’émigrer. Des études génétiques révèlent que la plupart des femmes venaient des îles britanniques. En 986, Eric le Rouge découvre le Groenland et y attire d’autres colons. Son fils pousse les expéditions jusqu’en Amérique du Nord mais est chassé par les autochtones. Les colons se retirent alors du Viniland.

En l’an 1000, les Islandais adoptent la religion chrétienne. Mais le pays compte aussi des païens. Pour préserver l’unité de l’assemblée nationale, les modérés suggèrent de baptiser l’ensemble du pays, les païens pourront pratiquer leur culte secrètement (dans la pratique, la liberté de culte sera officiellement proclamée en 1874). L’Église assoit sa puissance dans le pays.

Durant les quatre premiers siècles, le pays préserve son indépendance primitive. Mais l’assemblée nationale manque d’un statut exécutif et les disputes claniques menacent de diviser la société. Une guerre civile éclate : la Norvège assoit sa suprématie sur l’île. C’est à la fois pour des raisons politiques et économiques que l’Islande rejoint le royaume de Norvège en 1262. En 1380, la Norvège est sujet du Danemark. En 1397, les pays nordiques sont unifiés et l’Islande avec. En 1602, un monopole commercial est instauré entre le Danemark et l’Islande. Le roi danois luthérien prend le pouvoir en 1662.

Le 17ème et le 18ème siècle furent éprouvants pour l’Islande qui connut de nombreuses catastrophes naturelles dont une éruption volcanique aux lourdes conséquences. 1783 est une année extrêmement froide ; les poussières masquent le soleil. 70% des moutons et 60% des chevaux périssent. Ce refroidissement a un impact sur l’ensemble de l’hémisphère nord ; maladies, mauvaises récoltes, soulèvement populaire affaiblissent les populations européennes. En France, la famine sévit et les impôts perdurent. Cela nous conduira à la révolution…En Islande, la population passe de 70000 à 50000 habitants en 1783, pour atteindre son seuil le plus bas de 32000 habitants. Le roi pense évacuer le reste de la population mais finit par faire importer des rennes – mesure qui a peu de succès.

Au 19ème siècle, le climat se radoucit. L’industrie du poisson se développe, la population lutte pour l’indépendance. En 1865, une nouvelle éruption volcanique fait ravage. Face à de telles conditions climatiques, la population émigre vers les États-Unis. En 1874, le roi visite pour la première fois le pays ; la constitution islandaise est proclamée avec la mise en place d’un pouvoir législatif, la liberté de culte et la création de la banque d’Islande.

En 1918, l’Islande devient pleinement souveraine et signe une union personnelle avec le Danemark. Le roi est également roi d’Islande mais les habitants peuvent accepter ou refuser les successeurs. Le Danemark conserve la gestion des affaires étrangères et de la défense. En 1940, la guerre en Europe coupe les communications officielles entre les deux pays : l’Allemagne occupe le Danemark et l’Islande accueille les britanniques puis les américains. Le 17 juin 1944, la République d’Islande est fondée.

Arts

La passion pour la culture est réellement l’axe central de la société islandaise qui, même sans école obligatoire jusqu’en 1913, avait un taux extrêmement faible d’illettrisme.

Contes et sagas

Les Islandais se délectent à apprendre et à consigner l’histoire de tous les peuples, tenant pour aussi méritoire de décrire les exploits d’autrui que d’en accomplir eux-mêmes.  » Cette rage d’écrire avait un nom : saga (substantif du verbe segja, dire, raconter). Le mot a été depuis quelque peu galvaudé. Mais au Moyen Age, en Islande et en Norvège, il délimite un genre littéraire bien précis dont l’âge d’or se situe entre le douzième et le treizième siècle.

Une saga, c’est d’abord un récit en prose, souvent relativement court et extrêmement structuré. On y conte la vie des grands hommes (notables islandais ou souverains norvégiens) ou bien encore des hauts faits légendaires du Nord et de la Germanie antiques. Véritables joyaux de la littérature médiévale, remarquables par leur style, ciselé, concis, et leur puissance d’évocation. Les Islandais aiment savoir le destin tapi derrière leur porte. C’est sans doute ce qui donne à leurs sagas ce caractère grandiose et dérisoire, sublime et pathétique;

Peintures

Les beaux arts sont apparus plus tardivement au 19ème siècle.

Les peintres les plus célèbres sont : Asgrimur Jonsson, Jon Stefansson, and Johannes Kjarval.

L’Islande compte aussi de nombreux poètes.

Et les Islandais dans tout ça ?

Les Islandais ont une conception très claire de leur identité. Passionnés de généalogie, la plupart d’entre eux connaissent leurs ancêtres sur au moins six ou sept générations. Il n’est pas rare de voir affiché, dans les fermes qui accueillent les voyageurs, l’arbre généalogique des propriétaires. Certains remontent même jusqu’au premier millénaire, à l’époque de la colonisation de l’Islande par les vikings!

Les noms sont basés sur des patronymes. Il n’existe pas de noms communs. Les femmes gardent généralement leur nom de jeune fille après le mariage. Surprenant, ce sont les prénoms qui sont répertoriés dans les annuaires ! L’usage du prénom est un signe d’égalité et une pratique qui reflète la convivialité des islandais.

Le peuple islandais est fier de ses origines et de son histoire. La société est homogène et la cohésion sociale forte. Vaillants, fiers, réservés, respectueux de la nature dominante, ils sont à l’image de leur pays, un proverbe islandais ne dit il pas :

« La faim, le travail et la sueur sont les meilleures herbes » ; le retour aux sources est garanti !

91% de la population appartient à l’église évangélique luthérienne. Mais les traditions mythologiques scandinaves sont alimentées par les genres littéraires, et leur imaginaire par l’isolement ancestral.

La langue

L’Islandais est une branche nordique des langues germaniques. Du fait de son isolement et de l’épanouissement précoce de sa littérature, l’Islandais est l’une des rares langues germaniques à avoir conservé sa structure linguistique. Seul la phonétique et la prononciation se sont modifiées à la fin du Moyen-âge, le système grammatical n’ayant quasiment pas changé. Mais toutefois cette langue rugueuse, préservée depuis le Moyen âge, s’est parfaitement adaptée à la vie moderne grâce à la création constante de néologismes.

Le mélange des racines anciennes réserve quelques curiosités et poésies linguistiques : un avion est « une machine volante », un ordinateur est « une sorcière qui compte », une photo est une « image de lumière ». Suprenant n’est-ce pas ? Nous savons à présent d’où vient l’imagination débordante et surréaliste de Bjork 😉

Le mode de vie

Le musée en plein-air d’Arbær mérite une mention spéciale : d’anciennes maisons et églises y ont été transférées de tout le pays. On se replonge aisément dans le passé.

La construction de maisons en bois fut délaissée après les graves incendies de 1915.

La tôle qui recouvre fréquemment les toits de ses couleurs vives est choisie pour ses qualités de résistance contre la pluie, le vent et le feu. Le climat dantesque ne permet pas aux Islandais de vivre au dessus de 300 mètres. Les plateaux volcaniques, ravagés par le climat haut arctique, nous rappellent la valeur inestimable des sources de chaleur naturelle : la terre chauffe 86% des maisons. La douche géothermique (à l’odeur de soufre) est un plaisir total lorsque l’on vient d’affronter les rafales saturées de gel !

En bref, on a adoré ce territoire brut et surprenant qui ne laisse pas de glace, même en seulement 5 jours de parcours. Notre voyage remonte à plus de 13 ans mais je suis persuadée que le pays a gardé son pouvoir d’attractivité, préservé par sa nature désarmante et puissante.

Si vous y êtes allés et que vous avez des bons plans, n’hésitez pas à les partager en commentaires !